PARIS (Reuters) - Le parquet de Paris a annoncé mercredi avoir requis le 16 mai dernier le renvoi en correctionnelle de la société Total et de son actuel PDG, Christophe de Margerie, pour corruption d'agents publics étrangers dans le cadre de plusieurs contrats conclus avec des entreprises iraniennes.
Une information judiciaire pour abus de biens sociaux et corruption d'agents publics étrangers est ouverte au parquet de Paris depuis décembre 2006 sur ces contrats, conclus dans les années 1990 et au début des années 2000.
Relatifs au programme South Pars, décrit en 2009 comme le plus grand réservoir de gaz au monde, ils portent sur l'attribution de droits d'exploitation de champs pétroliers et gaziers en Iran.
Un porte-parole de Total a confirmé avoir reçu les réquisitions du parquet dans cette procédure.
"Dans l'éventualité d'un procès, Total et son PDG - directeur Moyen-Orient à l'époque - feront valoir l'entière légalité, au regard du droit français, du comportement qui leur est reproché", a-t-il déclaré.
Le parquet a requis le renvoi de la société Total du chef de corruption d'agents publics étrangers, et de Christophe de Margerie pour abus de biens sociaux et corruption d'agents publics étrangers, précise le parquet dans un communiqué.
Il a également demandé le renvoi devant un tribunal correctionnel de deux intermédiaires iraniens, Bijan Dadfar et Abbas Yazdi, pour recel d'abus de biens sociaux et complicité de corruption d'agents publics étrangers.
Au moment de l'annonce à Paris, l'autorité des marchés financiers américains a fait savoir que Total avait accepté de payer 398 millions de dollars (307 millions d'euros) pour mettre un terme aux procédures engagées à son encontre aux Etats-Unis dans ce même dossier.
"COMPORTEMENT CORRUPTEUR"
Le gendarme de Wall Street, qui enquêtait sur cette affaire de corruption internationale présumée depuis 2003, accuse le groupe pétrolier français d'avoir réalisé plus de 150 millions de dollars de profits en versant 60 millions de dollars de pots-de-vin à des intermédiaires d'un haut responsable iranien dans le but de remporter des contrats de développement.
"Total a eu recours à des paiements illicites pour gagner des contrats en Iran et en a tiré des bénéfices substantiels", a déclaré mercredi Andrew M. Calaman, directeur des bureaux new-yorkais de la Securities and Echange Commission (SEC), l'autorité des marchés financiers américains.
"Total doit aujourd'hui rembourser tous les profits tirés de son comportement corrupteur et payer en plus des pénalités."
Outre les pénalités financières, Total a accepté de se soumettre pendant trois ans à des programmes indépendants de contrôle du respect de la loi dans l'entreprise, a indiqué le ministère de la justice américain.
Dans son rapport annuel de 2012, la compagnie estimait qu'à ce stade, les enquêtes menées en France et aux Etats-Unis (où un accord financier était déjà envisagé) ne devaient pas avoir un "impact significatif" sur sa situation financière, ni de conséquence sur ses opérations futures.
Total avait par anticipation provisionné 316 millions d'euros sur ses comptes du deuxième trimestre 2012.
La décision de renvoyer Total et son actuel PDG devant un tribunal correctionnel en France appartient désormais au magistrat instructeur.
L'action Total a accéléré sa baisse suite aux annonces concernant ce dossier, le titre perdant jusqu'à 2,5%, contre -1,1% auparavant.
Chine Labbé, avec Michel Rose et Jean-Baptiste Vey à Paris, Jonathan Stempel à New York, édité par Yves Clarisse